Photo : Thibaud Teillard |
par Clémentine Vaysse, marsactu.fr,
13 février 2017
Une étude réalisée auprès d'une partie des habitants de Fos-sur-Mer et de Port-Saint-Louis-du-Rhône montre que la pollution industrielle fait exploser le nombre de maladies dont les cancers, le diabète ou encore l'asthme. L'étude est à lire en intégralité, au bas de l'article.
« Ici, il y a plus de cancers qu’ailleurs. » Longtemps, les habitants de l’étang de Berre et de Fos-sur-mer se sont vus répondre qu’il ne s’agissait là que d’une impression. Des témoignages de riverains et de travailleurs que le photographe Jacques Windenberger, habitué de cette zone industrialo-portuaire depuis les années 70, avait rassemblé en 2014 dans un documentaire intitulé « Tumeurs et silences ». « Ce sont des dires, il n’y a pas de chiffres », répondait alors une des responsables de l’agence régionale de santé, Laurence Pascal-Bensa. Un riverain des Carabins, quartier jouxtant l’aciérie d’ArcelorMittal, toujours en activité, évoquait alors « une mainmise de l’État sur les diagnostics de cancer autour de l’étang de Berre ».« Les statistiques sont sûrement bien au-dessus de la moyenne nationale », s’inquiétait Daniel Moutet, président de l’association de défense et de protection du littoral du Golfe de Fos, fervent opposant à l’installation, aujourd’hui effective, de l’incinérateur de déchets ménagers de Marseille.
Pour la première fois, une étude permet de confronter cette impression avec des chiffres. Menée par une équipe universitaire interdisciplinaire, elle s’est attachée à recenser les pathologies dont souffrent les habitants de deux villes entremêlées avec les usines, Fos et Port-Saint-Louis-du-Rhône. Pour vérifier la présence ou non d’un problème sanitaire, les chercheuses en charge de l’étude ont décidé de confronter les taux relevés sur place à la moyenne nationale, comme l’explique l’ethnologue Yolaine Ferrier dans une interview qu’elle nous a accordée. L’étude vise à déterminer ce que les chercheurs nomment « l’état de santé collectif ». Présentés à la population le mois dernier, puis relayés par le Journal de l’environnement, les résultats sur l’échantillon étudié confirment les craintes des riverains: on est bien plus malades à Fos qu’ailleurs, plus de deux fois plus.
Une étude réalisée auprès d'une partie des habitants de Fos-sur-Mer et de Port-Saint-Louis-du-Rhône montre que la pollution industrielle fait exploser le nombre de maladies dont les cancers, le diabète ou encore l'asthme. L'étude est à lire en intégralité, au bas de l'article.
« Ici, il y a plus de cancers qu’ailleurs. » Longtemps, les habitants de l’étang de Berre et de Fos-sur-mer se sont vus répondre qu’il ne s’agissait là que d’une impression. Des témoignages de riverains et de travailleurs que le photographe Jacques Windenberger, habitué de cette zone industrialo-portuaire depuis les années 70, avait rassemblé en 2014 dans un documentaire intitulé « Tumeurs et silences ». « Ce sont des dires, il n’y a pas de chiffres », répondait alors une des responsables de l’agence régionale de santé, Laurence Pascal-Bensa. Un riverain des Carabins, quartier jouxtant l’aciérie d’ArcelorMittal, toujours en activité, évoquait alors « une mainmise de l’État sur les diagnostics de cancer autour de l’étang de Berre ».« Les statistiques sont sûrement bien au-dessus de la moyenne nationale », s’inquiétait Daniel Moutet, président de l’association de défense et de protection du littoral du Golfe de Fos, fervent opposant à l’installation, aujourd’hui effective, de l’incinérateur de déchets ménagers de Marseille.
Pour la première fois, une étude permet de confronter cette impression avec des chiffres. Menée par une équipe universitaire interdisciplinaire, elle s’est attachée à recenser les pathologies dont souffrent les habitants de deux villes entremêlées avec les usines, Fos et Port-Saint-Louis-du-Rhône. Pour vérifier la présence ou non d’un problème sanitaire, les chercheuses en charge de l’étude ont décidé de confronter les taux relevés sur place à la moyenne nationale, comme l’explique l’ethnologue Yolaine Ferrier dans une interview qu’elle nous a accordée. L’étude vise à déterminer ce que les chercheurs nomment « l’état de santé collectif ». Présentés à la population le mois dernier, puis relayés par le Journal de l’environnement, les résultats sur l’échantillon étudié confirment les craintes des riverains: on est bien plus malades à Fos qu’ailleurs, plus de deux fois plus.
DEUX FOIS PLUS DE CANCERS
L’enquête participative, portant le nom d’Epseal, s’est faite en deux temps : des entretiens pour recenser les pathologies puis des ateliers thématiques avec des habitants et des médecins pour recueillir les témoignages. 816 personnes ont été interrogées soit 3 % de la population (8 % en tenant compte des foyers), sélectionnées de manière géographiquement aléatoire. Si près de la moitié des personnes interrogées travaillent dans un milieu qu’elles estiment en lien avec la pollution industrielle, les autres ne font que vivre dans cette proximité immédiate des établissements polluants. Sur cet échantillon de personnes interrogées, la prévalence des pathologies potentiellement liées à l’exposition à des polluants est très au-dessus des moyennes nationales.
Les premières maladies étudiées sont les cancers. Ces derniers « inquiètent les habitants qui procèdent à des formes d’épidémiologies populaires centrées autour de leur expérience et de leur réseau d’interconnaissances », écrivent les chercheuses. Pour chaque pathologie, les liens établis ou supposés avec les polluants ou le cumul de pollution sont exposés. Sur les personnes consultées, 11,8 % « ont ou ont eu un (ou plusieurs) cancers », contre une moyenne française de 6 %. L’étude retient une « prévalence très élevée de cancers sans lien avec le revenu socio-économique ». Comme dans le quartier des Carabins, à Fos, le plus proche de l’aciérie d’ArcelorMittal mais aussi une zone historiquement plutôt aisée, pavillonnaire. Les cancers chez les habitants interrogés y sont quatre fois plus élevés que la moyenne nationale, un habitant sur cinq en souffre ou en a souffert.
L’enquête participative, portant le nom d’Epseal, s’est faite en deux temps : des entretiens pour recenser les pathologies puis des ateliers thématiques avec des habitants et des médecins pour recueillir les témoignages. 816 personnes ont été interrogées soit 3 % de la population (8 % en tenant compte des foyers), sélectionnées de manière géographiquement aléatoire. Si près de la moitié des personnes interrogées travaillent dans un milieu qu’elles estiment en lien avec la pollution industrielle, les autres ne font que vivre dans cette proximité immédiate des établissements polluants. Sur cet échantillon de personnes interrogées, la prévalence des pathologies potentiellement liées à l’exposition à des polluants est très au-dessus des moyennes nationales.
Les premières maladies étudiées sont les cancers. Ces derniers « inquiètent les habitants qui procèdent à des formes d’épidémiologies populaires centrées autour de leur expérience et de leur réseau d’interconnaissances », écrivent les chercheuses. Pour chaque pathologie, les liens établis ou supposés avec les polluants ou le cumul de pollution sont exposés. Sur les personnes consultées, 11,8 % « ont ou ont eu un (ou plusieurs) cancers », contre une moyenne française de 6 %. L’étude retient une « prévalence très élevée de cancers sans lien avec le revenu socio-économique ». Comme dans le quartier des Carabins, à Fos, le plus proche de l’aciérie d’ArcelorMittal mais aussi une zone historiquement plutôt aisée, pavillonnaire. Les cancers chez les habitants interrogés y sont quatre fois plus élevés que la moyenne nationale, un habitant sur cinq en souffre ou en a souffert.
LES FEMMES TROIS FOIS PLUS TOUCHÉES QU’AILLEURS EN FRANCE
Les données récoltées mettent en avant une élévation du nombre de cancers encore plus conséquente chez les femmes. 14,5 % des femmes interrogées ont été ou sont concernées par la maladie contre une moyenne nationale de 5,3 %. Les cancers du sein et de l’utérus, en particulier du corps de l’utérus (l’endomètre), sont les plus communs. « La piste environnementale résidentielle et une plus grande vulnérabilité des femmes à certains polluants perturbant le fonctionnement hormonal ou affectant des organes qui le régulent reste l’explication la plus probable », est-il expliqué. Parmi les causes évoquées se trouvent la consommation des poissons et coquillages potentiellement pollués aux PCB (polychlorobiphényles), des plastiques cancérigènes, la pollution atmosphérique, mais aussi, comme ce fut le cas pour l’amiante, le « nettoyage à la maison des bleus de travail encore imprégnés des « poussières » et polluants des expositions professionnelles des hommes du foyer ».
L’étude fait également part d’une préoccupation des habitants au sujet de la fertilité, féminine mais aussi masculine. Un biologiste de la reproduction, Vincent Achard racontait à ce sujet lors d’un atelier en septembre 2016: « Ce qui m’a un peu alerté, c’est le traitement géographique des données que j’avais fait sur mes patients, et considéré entre deux zones, Avignon et Martigues, où Air Paca a deux capteurs dédiés aux pesticides. Les pesticides sont globalement plus présents autour d’Avignon donc je m’attendais à ce que les spermogrammes les moins bons se situent à Avignon, puisque l’influence des pesticides sur la fertilité est documentée dans la littérature. Bizarrement, c’est la zone de Martigues qui est ressortie avec des spermogrammes de moins bonne qualité et la qualité des ovocytes pour les femmes y était aussi moins bonne ».
Les données récoltées mettent en avant une élévation du nombre de cancers encore plus conséquente chez les femmes. 14,5 % des femmes interrogées ont été ou sont concernées par la maladie contre une moyenne nationale de 5,3 %. Les cancers du sein et de l’utérus, en particulier du corps de l’utérus (l’endomètre), sont les plus communs. « La piste environnementale résidentielle et une plus grande vulnérabilité des femmes à certains polluants perturbant le fonctionnement hormonal ou affectant des organes qui le régulent reste l’explication la plus probable », est-il expliqué. Parmi les causes évoquées se trouvent la consommation des poissons et coquillages potentiellement pollués aux PCB (polychlorobiphényles), des plastiques cancérigènes, la pollution atmosphérique, mais aussi, comme ce fut le cas pour l’amiante, le « nettoyage à la maison des bleus de travail encore imprégnés des « poussières » et polluants des expositions professionnelles des hommes du foyer ».
L’étude fait également part d’une préoccupation des habitants au sujet de la fertilité, féminine mais aussi masculine. Un biologiste de la reproduction, Vincent Achard racontait à ce sujet lors d’un atelier en septembre 2016: « Ce qui m’a un peu alerté, c’est le traitement géographique des données que j’avais fait sur mes patients, et considéré entre deux zones, Avignon et Martigues, où Air Paca a deux capteurs dédiés aux pesticides. Les pesticides sont globalement plus présents autour d’Avignon donc je m’attendais à ce que les spermogrammes les moins bons se situent à Avignon, puisque l’influence des pesticides sur la fertilité est documentée dans la littérature. Bizarrement, c’est la zone de Martigues qui est ressortie avec des spermogrammes de moins bonne qualité et la qualité des ovocytes pour les femmes y était aussi moins bonne ».
EXPLOSION DU DIABÈTE
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