Percée majeure dans le diagnostic de l’électrohypersensibilité
par André Fauteux, maisonsaine.ca, 27 décembre 2017
Les personnes intolérantes aux champs électromagnétiques (CEM) ont des manifestations cérébrales évidentes non observables chez celles qui ne le sont pas, selon une récente étude américaine. L’équipe du toxicologue clinicien californien Gunnar Heuser a soumis dix patients qui se disaient atteints d’électrohypersensibilité (EHS) à une imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf), test qui mesure l’activité des neurones qui déclenche une augmentation de la circulation sanguine dans les régions du cerveau sollicitées.
(Photo): Dr Heuser estime que l’exposition aux appareils et à l’instrastructure de télécommunications sans fil a causé l’hyperconnectivité du cerveau de ses patients, par exemple ici à gauche, alors qu’à droite il s’agit d’un cerveau normal. © PRNewsfoto/The Peoples Initiative Foundation
Aujourd’hui âgé de 90 ans, le Dr Heuser est sorti de sa retraite il y a quelques années pour traiter le nombre croissant de patients atteints d’EHS, syndrome qui est devenu sa spécialité comme le montre le nom de son site web, emfdoc.com. Reçu médecin en Allemagne en 1952, il a obtenu un doctorat en médecine et chirurgie expérimentale de l’Université de Montréal en 1957 et un diplôme en médecine interne à McGill en 1959. Également clinicien en neurophysiologie et médecin légiste, il est l’auteur de nombreuses publications, dont l’une parue en 1954 et cosignée avec son mentor, le pionnier montréalais du stress Hans Selye. Longtemps chercheur à l’institut de recherche sur le cerveau de l’Université de la Californie à Los Angeles, Dr Heuser est retourné à l’enseignement et à la pratique de la médecine clinique. Sur plus de trois décennies, il a traité plus de mille personnes empoisonnées par des produits chimiques, dont plusieurs étaient devenues hypersensibles à ceux-ci. Plusieurs d’entre elles présentaient des désordres émotionnels causés par une amygdale hyperactive, selon des scanographies de cette partie du cerveau qui contrôle les émotions.
Comme l’IRMf n’est pas couverte par les assurances, les patients participant à sa plus récente étude ont dû assumer les coûts des tests. Tous avaient travaillé ou vécu dans des environnements où les CEM de basses et hautes fréquences étaient élevés, par exemple un monteur de lignes, un réparateur de batteries et un contrôleur aérien. Plusieurs d’entre eux avaient subi des commotions cérébrales ou des empoisonnements à des produits chimiques. (Dr Heuser les traite notamment avec l’oxygénothérapie hyperbare.) Tous étaient atteints de symptômes multisystémiques intermittents, tels céphalées et autres douleurs, problèmes cognitifs, de mémoire, de coordination, d’équilibre et d’orientation, insomnie, fatigue chronique, cataractes, tremblements, convulsions, perte de conscience et EHS. Ces symptômes apparaissaient et disparaissaient selon leur exposition aux CEM provenant de lignes et appareils électriques filés et sans fil, dont des compteurs intelligents et des antennes de téléphonie cellulaire. Ils ont d’abord tous subi une batterie de tests éliminant la présence de maladies diverses. Des scans cérébraux par tomographie furent exclus pour éviter de les exposer à des radiations. Un test d’imagerie par résonance magnétique classique du cerveau ne montrait pour la plupart aucune particularité chez ces patients.
Intitulée Functional brain MRI in patients complaining of electrohypersensitivity after long term exposure to electromagnetic fields, son étude fut publiée en juillet dernier dans Reviews on Environmental Health, mais sans les images ci-contre comparant le cerveau d’une personne électrosensible avec celui d’une personne qui ne l’est pas. L’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle en trois dimensions a révélé une hyperconnectivité cérébrale dans la région orbitofrontale médiale. L’hyperconnectivité signifie qu’un nombre anormal de secteurs du cerveau sont activés en même temps.
Le Dr Heuser croit que l’exposition aux micro-ondes émises par les infrastructures et appareils de télécommunication sans fil en sont la cause. C’est la première étude à analyser la connectivité fonctionnelle du cerveau en rapport avec les CEM. Le test a généralement décelé d’autres anomalies, dont une réduction de la circulation sanguine dans certaines parties du cerveau. C’est d’ailleurs ce qu’a notamment révélé une étude parue en 2015 et dirigée par l’oncologue français Dominique Belpomme. Son équipe soumettait des patients EHS à une tomosphygmographie cérébrale par ultrasons pulsés (encéphaloscan).
« Nous espérions pouvoir documenter des anomalies objectives chez ces patients souvent étiquetés comme des cas psychiatriques », relate le Dr Heuser en ajoutant : « Tous les scans étaient anormaux avec des anomalies qui étaient consistantes et similaires. Il est proposé que les scintigraphies cérébrales IRMf soient utilisées comme aide diagnostique pour déterminer si un patient présente ou non une hypersensibilité électromagnétique. »
Fait intéressant, le diagnostic différentiel des anomalies observées sur l’IRMf comprend les blessures à la tête, ajoute le Dr Heuser. « Il se trouve que beaucoup de nos patients avaient en effet des antécédents de traumatisme crânien qui ont après été suivis plus tard par le développement de l’EHS. Beaucoup de nos patients avaient également des antécédents d’exposition à des produits chimiques potentiellement neurotoxiques, en particulier les moisissures. Les blessures à la tête et l’exposition aux produits chimiques neurotoxiques peuvent rendre un patient plus vulnérable au développement de l’EHS. Feu Dr Ross Adey a découvert que les produits chimiques et les CEM peuvent interagir et aggraver les effets de chacun. Cette observation fut confirmée chez nos patients. »
« Cette étude apporte la preuve qu’il existe des anomalies dans le cerveau des gens EHS qui ne sont pas présentes dans un cerveau non EHS et pourrait mettre fin au débat sur l’existence de l’EHS, affirme la fondation People’s Initiative qui a organisé l’étude. Elle défie aussi la position largement répandue par l’industrie du sans-fil et les gouvernements selon laquelle l’exposition aux micro-ondes n’a aucune conséquence sur la santé humaine et pourrait avoir une incidence sur l’opinion dominante affirmant que le rayonnement sans fil est réputé sécuritaire. »
L’étude du Dr Heuser ajoute au poids de la preuve des milliers d’études, la plupart publiées depuis les années 1950, qui démontrent que des effets biologiques « non thermiques » sont associés à l’exposition à de très faibles doses chroniques de CEM. Ces radiations sont émises autant par les câbles et appareils sur lesquels circulent de l’électricité oscillant à d’extrêmement basses fréquences (60 hertz) que par les technologies émettrices de radiofréquences (RF), comme les antennes, les cellulaires et les tablettes. Ces technologies émettent typiquement dans les bandes des mégahertz et des gigahertz, ce qui signifie que l’onde change de polarité des millions ou des milliards de fois par seconde.
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https://maisonsaine.ca/sante-et-securite/hypersensibilite/percee-majeure-dans-le-diagnostic-de-lelectrohypersensibilite.html
AU SUJET DE L'AUTEUR
Journaliste de profession, André Fauteux fut reporter à The Gazette (1988) puis chez Habitabec (1989-1994) où il s’est spécialisé en maisons saines et écologiques. En 1994, il fondait La Maison du 21e siècle, plus ancien magazine canadien en la matière, dont il est toujours l'éditeur et le rédacteur en chef. Il a également été collaborateur à La Presse et au magazine Guide Ressources pendant 15 ans. Il est aussi un conseiller, formateur et conférencier recherché pour tout ce qui touche à l'habitat sain et durable.
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