AVEC LA 5G: QUI VA PAYER SI CELA TOURNE MAL POUR LA SANTÉ?
par ERIC FELLEY, lematin.ch, 10 juin 2019
Le passage à la 5G oblige à envisager la question des responsabilités sur les éventuels coûts pour la santé. Pour le Conseil fédéral, les scénarios sont multiples et les opérateurs semblent bien protégés.
Pas d'étude sur le long terme
Cela dit, le Conseil fédéral, dans différentes réponses à des parlementaires, reconnaît que des recherches ont montré des effets biologiques des rayonnements sur l'homme, sans pour autant établir leur dangerosité. L'Organisation mondiale de la santé (OMC) a classé le rayonnement de haute fréquence comme «potentiellement cancérigène pour l'homme», mais pas pour les ondes faibles actuellement utilisées. L'OMC reconnaît enfin, et surtout, qu'il n'existe pas d'étude pertinente menée sur le long terme.
Après plusieurs années
C'est ce «long terme» qui inquiète la Conseillère nationale Martina Munz (PS/SH). Elle a interpellé le Conseil fédéral sur la question des responsabilités. Si, dans dix ans ou quinze ans commencent à apparaître des affections liées à ces rayonnements, qui assumera la responsabilité d'éventuels coûts sanitaires? Question très helvétique: qui va payer si cela tourne mal?
Le lien de cause à effet
La réponse du Conseil fédéral préfigure une situation juridique complexe. La réparation du dommage sanitaire causé par le rayonnement de la téléphonie mobile pourrait être demandée sur la base de plusieurs dispositions du Code Civil, «pour autant que le requérant puisse justifier du lien de cause à effet», est-il bien précisé.
De l'exploitant à l'Etat
Dans sa réflexion, le Conseil fédéral passe en revue les différents acteurs qui pourraient être appelés en responsabilités: l'exploitant (les opérateurs), le propriétaire foncier ou le propriétaire de l'ouvrage (les antennes), les producteurs des équipements ou enfin l'autorité concédante «conformément aux dispositions générales relatives à la responsabilité de l'Etat.» L'exploitant pourrait aussi répondre des dommages en vertu de la loi sur l'environnement, car les installations de téléphonie mobile sont qualifiées «d'installations qui présentent un danger particulier pour l'environnement».
Pas de responsabilité rétroactive
Cela ne s'annonce pas si simple, notamment au sujet d'un éventuel effet rétroactif. Pour les juristes de la Confédération, si une installation de téléphonie mobile est exploitée conformément aux dispositions en vigueur aujourd'hui - et même si, plus tard, on découvre que ces dispositions étaient insuffisantes - l'obligation de diligence a été remplie au moment où le dommage a été causé et la responsabilité de l'exploitant ne saurait être engagée.
Personne responsable ?
Le derniers scénario évoqué par le Conseil fédéral est qu'on ne pourra pas établir de responsabilité: «Si les conditions de la responsabilité ne sont pas remplies et qu'il n'est donc pas possible d'obtenir réparation, il incombe à la personne concernée ou, comme c'est le cas concernant d'autres atteintes à la santé, à la collectivité de supporter les coûts de santé éventuels». Autrement dit, ils seront assumés par la LAMal, ni plus, ni moins, sans aucune indemnité à espérer.
Un fond comme pour le nucléaire
Martina Mund s'interroge ainsi sur la création d'un «fond de mutualisation», comme il en existe un pour les risques nucléaires. Celui-ci permettrait d'aider la collectivité à supporter ces coûts de santé, voire d'indemniser des gens. Le Conseil fédéral estime qu'il faudrait dès lors légiférer: «L'introduction d'une responsabilité causale stricte des opérateurs de téléphonie mobile pour les dommages causés à la santé par le rayonnement, ainsi que la création d'un fonds de mutualisation devraient être motivées en conséquence et mises en oeuvre dans le cadre de la procédure législative formelle.» Pour l'instant, rien n'est prévu de ce genre.
(Le Matin)
https://www.lematin.ch/suisse/5g-payer-tourne-mal-sante/story/14271355
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