(Photo) : Louisa Diaz, membre du comité de l’association Stop5G: «Quelle est l’utilité d’avoir une bande passante gigantesque pour consulter TikTok ou regarder des vidéos X?» — © © VFLPIX.COM / VALENTIN FLAURAUD POUR LE TEMPS
Les autocollants «Stop 5G» ont quasiment disparu des rues, les militants n’ont pu organiser aucune manifestation, aucune initiative n’a été lancée… A première vue, en Suisse, les opposants à la 5G ont abandonné la lutte. Quoi de plus normal, puisque Swisscom et Sunrise affirment déjà couvrir 90% de la population avec cette technologie? Mais les apparences sont trompeuses. Sans faire de bruit, en agissant au niveau local, les militants ont intensifé leur action. En menant une guérilla d’opposition à tout projet d’antenne, ils mènent la vie dure aux opérateurs. Dans le cadre de cet article, nous avons voulu donner la parole à celles et ceux qui lutent toujours contre la 5G, plus de deux ans après l’attribution des licences à Swisscom, Sunrise et Salt.
Parmi ces militants, il y a Louisa Diaz, membre du comité de l’association Stop5G. Pour elle, la bataille n’est de loin pas terminée, malgré les milliers d’antennes déjà activées. «Attention, ces antennes diffusent une sorte de 4G améliorée, qui n’utilise ni les ondes millimétriques, ni ne propose les débits promis par les opérateurs. La vraie 5G n’en est qu’à ses débuts et nous faisons tout pour lutter contre son déploiement.» Selon Louisa Diaz, les militants anti-5G parviennent à faire opposition à 90% des mises à l’enquête des opérateurs au niveau suisse. «Parfois une mise à l’enquête nous échappe, parfois nous ne trouvons personne au niveau local, éligible pour faire opposition, qui soit motivé. Mais dans l’immense majorité des cas, nos actions permettent de bloquer les projets des opérateurs», poursuit-elle.
Oppositions par centaines
Stop5G, c’est un comité de cinq personnes et près de 2000 membres. Mais au-delà de cette association, les opposants à cete technologie sont très nombreux. Impossible, pour Louisa Diaz, de citer tous les comités et associations anti-5G en Suisse, tant il y en a. «Il existe une multitude de comités locaux, cantonaux et des organisations aussi très efficaces en Suisse alémanique. Et surtout, de très nombreux citoyens, sur le terrain, s’opposent à la 5G. A Yverdon, nous avons obtenu 720 oppositions pour une seule antenne, il y en a eu 600 à Pully… Le mouvement est massif.»
Les militants épluchent les avis d’enquête, vont sur le terrain, distribuent des flyers et discutent avec les riverains. A Pully, c’est Dimitri Debrieux qui a lancé le mouvement. «J’ai d’abord voulu faire, avec des voisins, opposition à une antenne 5G près de chez moi. Puis j’ai vu qu’il y avait cinq autres antennes prévues à Pully. Du coup j’ai contacté des riverains, je leur ai expliqué la procédure pour s’opposer. En général, si nous trouvons une personne motivée par immeuble, nous lui demandons d’expliquer à ses voisins comment faire. C’est ainsi que nous avons récolté des centaines d’oppositions, que j’ai consignées dans un fichier Excel.»
Mais cette lutte n’est-elle tout de même pas perdue d’avance, les opérateurs développant petit à petit leur réseau? «Non, nous faisons ce que nous devons faire, il en va de l’intérêt général, affrme Louisa Diaz. Je suis peut-être trop positive, mais nous obtenons des résultats: nous infligeons des retards importants aux opérateurs et nous, les multiples associations, n’hésitons pas à agir devant les tribunaux cantonaux, et jusqu’au Tribunal fédéral si c’est nécessaire. Par ailleurs, plusieurs initiatives sont aussi en préparation, qui seront lancées lorsque la récolte de signatures sera plus aisée, en marge de celles dont les récoltes ont déjà commencé. Nous utilisons tous les moyens démocratiques à notre disposition.»
Ce que demandent en filigrane les opposants, c’est aussi d’être écoutés. «Nos élus doivent tenir compte de tous ces citoyens qui se mobilisent, afrme Dimitri Debrieux. Qu’ils nous écoutent! Ne voient-ils pas la vague verte déferler? Et pourquoi les opérateurs sont-ils si pressés de déployer la 5G? Je crains un futur scandale sanitaire lié à cete technologie, qui ne nous apportera en plus aucun bénéfice.»
«Manque de transparence»
Même à Genève, où le moratoire décidé par les autorités cantonales est le plus dur de Suisse, la mobilisation demeure vive. «Les opérateurs prétendent qu’ils n’effectuent que des modifcations mineures et donc légales sur leurs antennes, mais nous avons beaucoup de peine à accéder aux dossiers. Il y a un manque terrible de transparence. Nous devons rester vigilants et faisons opposition partout où nous le pouvons», afrme Ghislaine Jacquier, de l’association 5G moratoire pour la Suisse. Pour elle, il est exclu de baisser les bras: «Je ne veux pas revivre le scandale de l’amiante. Je pense que des vérités scientifques vont sortir au sujet de la nocivité de la 5G. Il existe beaucoup d’études qui l’ont déjà démontrée.»
Ghislaine Jacquier ajoute des arguments qui dépassent la 5G en elle-même. «Quelle société voulons-nous construire? Voulons-nous vivre dans un bouillon d’ondes? Voulons-nous que nos enfants soient en permanence devant des écrans?»
Inquiétude pour le climat
Pour Louisa Diaz, ces préoccupations ne sont pas nouvelles. Selon elle, les inquiétudes par rapport aux conséquences sur la santé n’ont pas été remplacées par des préoccupations plus larges. «Nous sommes toujours très soucieux de l’impact de la 5G sur le vivant, que ce soit le stress oxydatif causé sur nos cellules, les impacts sur notre ADN, notre système nerveux (concentration, mémoire, sommeil…) ou pour la vie des personnes intolérantes aux ondes, qui sont, selon nous, entre 600 000 et 800 000 en Suisse. Mais depuis le début, nous avons aussi remis en cause le modèle de société que veulent nous imposer les opérateurs.»
Comme de nombreux autres militants, Louisa Diaz embrasse une cause très large. «Interrogeons-nous sur les usages et le but de toutes ces connexions. Quelle est l’utilité d’avoir une bande passante gigantesque pour consulter TikTok ou regarder des vidéos X? Et nous nous questionnons aussi sur l’impact de ces technologies pour l’environnement: les opérateurs disent que la 5G est beaucoup plus économe en électricité que la 4G, mais c’est faux selon l’Institut des ingénieurs électriciens et électroniciens. Le numérique émet 4% des émissions de gaz à effet de serre, et sa part progresse de 9% par année, ce sont là des faits avérés scientifquement. On va droit dans le mur.»
Les anti-5G demandent aussi de favoriser les alternatives, les connexions filaires, de réduire l’utilisation du wi-fi et, plus globalement, appellent à un débat sur la sobriété numérique. Pour l’heure, aucun opérateur n’a voulu entrer sur ce terrain de discussion.
https://www.letemps.ch/economie/guerilla-contre-5g-sintensifie-suisse-faire-bruit
Les autocollants «Stop 5G» ont quasiment disparu des rues, les militants n’ont pu organiser aucune manifestation, aucune initiative n’a été lancée… A première vue, en Suisse, les opposants à la 5G ont abandonné la lutte. Quoi de plus normal, puisque Swisscom et Sunrise affirment déjà couvrir 90% de la population avec cette technologie? Mais les apparences sont trompeuses. Sans faire de bruit, en agissant au niveau local, les militants ont intensifé leur action. En menant une guérilla d’opposition à tout projet d’antenne, ils mènent la vie dure aux opérateurs. Dans le cadre de cet article, nous avons voulu donner la parole à celles et ceux qui lutent toujours contre la 5G, plus de deux ans après l’attribution des licences à Swisscom, Sunrise et Salt.
Parmi ces militants, il y a Louisa Diaz, membre du comité de l’association Stop5G. Pour elle, la bataille n’est de loin pas terminée, malgré les milliers d’antennes déjà activées. «Attention, ces antennes diffusent une sorte de 4G améliorée, qui n’utilise ni les ondes millimétriques, ni ne propose les débits promis par les opérateurs. La vraie 5G n’en est qu’à ses débuts et nous faisons tout pour lutter contre son déploiement.» Selon Louisa Diaz, les militants anti-5G parviennent à faire opposition à 90% des mises à l’enquête des opérateurs au niveau suisse. «Parfois une mise à l’enquête nous échappe, parfois nous ne trouvons personne au niveau local, éligible pour faire opposition, qui soit motivé. Mais dans l’immense majorité des cas, nos actions permettent de bloquer les projets des opérateurs», poursuit-elle.
Oppositions par centaines
Stop5G, c’est un comité de cinq personnes et près de 2000 membres. Mais au-delà de cette association, les opposants à cete technologie sont très nombreux. Impossible, pour Louisa Diaz, de citer tous les comités et associations anti-5G en Suisse, tant il y en a. «Il existe une multitude de comités locaux, cantonaux et des organisations aussi très efficaces en Suisse alémanique. Et surtout, de très nombreux citoyens, sur le terrain, s’opposent à la 5G. A Yverdon, nous avons obtenu 720 oppositions pour une seule antenne, il y en a eu 600 à Pully… Le mouvement est massif.»
Les militants épluchent les avis d’enquête, vont sur le terrain, distribuent des flyers et discutent avec les riverains. A Pully, c’est Dimitri Debrieux qui a lancé le mouvement. «J’ai d’abord voulu faire, avec des voisins, opposition à une antenne 5G près de chez moi. Puis j’ai vu qu’il y avait cinq autres antennes prévues à Pully. Du coup j’ai contacté des riverains, je leur ai expliqué la procédure pour s’opposer. En général, si nous trouvons une personne motivée par immeuble, nous lui demandons d’expliquer à ses voisins comment faire. C’est ainsi que nous avons récolté des centaines d’oppositions, que j’ai consignées dans un fichier Excel.»
Mais cette lutte n’est-elle tout de même pas perdue d’avance, les opérateurs développant petit à petit leur réseau? «Non, nous faisons ce que nous devons faire, il en va de l’intérêt général, affrme Louisa Diaz. Je suis peut-être trop positive, mais nous obtenons des résultats: nous infligeons des retards importants aux opérateurs et nous, les multiples associations, n’hésitons pas à agir devant les tribunaux cantonaux, et jusqu’au Tribunal fédéral si c’est nécessaire. Par ailleurs, plusieurs initiatives sont aussi en préparation, qui seront lancées lorsque la récolte de signatures sera plus aisée, en marge de celles dont les récoltes ont déjà commencé. Nous utilisons tous les moyens démocratiques à notre disposition.»
Ce que demandent en filigrane les opposants, c’est aussi d’être écoutés. «Nos élus doivent tenir compte de tous ces citoyens qui se mobilisent, afrme Dimitri Debrieux. Qu’ils nous écoutent! Ne voient-ils pas la vague verte déferler? Et pourquoi les opérateurs sont-ils si pressés de déployer la 5G? Je crains un futur scandale sanitaire lié à cete technologie, qui ne nous apportera en plus aucun bénéfice.»
«Manque de transparence»
Même à Genève, où le moratoire décidé par les autorités cantonales est le plus dur de Suisse, la mobilisation demeure vive. «Les opérateurs prétendent qu’ils n’effectuent que des modifcations mineures et donc légales sur leurs antennes, mais nous avons beaucoup de peine à accéder aux dossiers. Il y a un manque terrible de transparence. Nous devons rester vigilants et faisons opposition partout où nous le pouvons», afrme Ghislaine Jacquier, de l’association 5G moratoire pour la Suisse. Pour elle, il est exclu de baisser les bras: «Je ne veux pas revivre le scandale de l’amiante. Je pense que des vérités scientifques vont sortir au sujet de la nocivité de la 5G. Il existe beaucoup d’études qui l’ont déjà démontrée.»
Ghislaine Jacquier ajoute des arguments qui dépassent la 5G en elle-même. «Quelle société voulons-nous construire? Voulons-nous vivre dans un bouillon d’ondes? Voulons-nous que nos enfants soient en permanence devant des écrans?»
Inquiétude pour le climat
Pour Louisa Diaz, ces préoccupations ne sont pas nouvelles. Selon elle, les inquiétudes par rapport aux conséquences sur la santé n’ont pas été remplacées par des préoccupations plus larges. «Nous sommes toujours très soucieux de l’impact de la 5G sur le vivant, que ce soit le stress oxydatif causé sur nos cellules, les impacts sur notre ADN, notre système nerveux (concentration, mémoire, sommeil…) ou pour la vie des personnes intolérantes aux ondes, qui sont, selon nous, entre 600 000 et 800 000 en Suisse. Mais depuis le début, nous avons aussi remis en cause le modèle de société que veulent nous imposer les opérateurs.»
Comme de nombreux autres militants, Louisa Diaz embrasse une cause très large. «Interrogeons-nous sur les usages et le but de toutes ces connexions. Quelle est l’utilité d’avoir une bande passante gigantesque pour consulter TikTok ou regarder des vidéos X? Et nous nous questionnons aussi sur l’impact de ces technologies pour l’environnement: les opérateurs disent que la 5G est beaucoup plus économe en électricité que la 4G, mais c’est faux selon l’Institut des ingénieurs électriciens et électroniciens. Le numérique émet 4% des émissions de gaz à effet de serre, et sa part progresse de 9% par année, ce sont là des faits avérés scientifquement. On va droit dans le mur.»
Les anti-5G demandent aussi de favoriser les alternatives, les connexions filaires, de réduire l’utilisation du wi-fi et, plus globalement, appellent à un débat sur la sobriété numérique. Pour l’heure, aucun opérateur n’a voulu entrer sur ce terrain de discussion.
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