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23 janv. 2022

Effets des champs électromagnétiques sur la mélatonine


Effets des champs électromagnétiques sur la mélatonine

Jacques Lintermans, Docteur en sciences et André Vander Vorst*, Professeur ém.UCLouvain 
 *Membre fondateur de la European Microwave Association



Chez un sujet exposé à des champs électromagnétiques (CEM), leur absorption par les différentes parties du corps ne se fait pas de manière égale.

On a par exemple calculé par le logiciel MATLAB le taux d’absorption spécifique (SAR) dans les yeux, le cerveau et divers tissus biologiques pour des bandes variées de fréquences de communications sans fil, en particulier à 900 et 1800 MHz (1). On trouve une absorption spécifique maximum de l’ordre de 9x106 Watt par kilog de matière dans l’œil et de 5,5x106 Watt par kilog de matière dans le cerveau. Il faut se rappeler que le SAR est proportionnel au carré du champ électrique induit et est inversement proportionnel au carré de la distance de la source à l’élément de tissu. 

Il se peut donc qu’une absorption préférentielle des CEM se fasse par les yeux auquel cas ils pourraient suivre le même trajet que la lumière arrivant de la rétine jusqu’à la glande pinéale.




Ce trajet part du tractus rétino-hypothalamique(RHT) contenant des ganglions photosensibles pour aller vers le noyau suprachiasmatique (SCN) modulateur du rythme circadien, puis vers le ganglion cervical supérieur (SCN) dont l’innervation sympathique contrôle l’activité journalière, pour aboutir à la glande pinéale où a lieu la sécrétion de mélatonine (voir schéma) (2).




Chaque étape de ce mécanisme peut éventuellement être altérée par les CEM avec pour conséquence un effet sur la mélatonine.

Toutefois, ni une étude à court terme chez des volontaires expérimentalement exposés, ni des mesures effectuées sur des sujets exposés durant leur vie professionnelle à des CEM n’ont montré de différence avec des groupes témoins en ce qui concerne les niveaux de mélatonine (3).

Sont donc remarquables les résultats d’une étude clinique portant sur plusieurs centaines de sujets catégorisés électrohypersensibles (EHS) chez qui la mélatonine, mesurée dans les urines de 24 heures sous forme de para-hydroxysulfate (6-OHMS) qui en est le métabolite principal, a montré une déplétion dans 88% des cas (4).

Cependant, si un tel effet peut être attribué à une exposition aux CEM, on ne peut exclure que d’autres causes en soient responsables en rapport avec l’état de santé du sujet.

A cet égard, dans une étude effectuée chez des malades atteints de dépression, si les taux de mélatonine nocturne et diurne sont inversés par rapport à ceux d’un groupe témoin, on n’observe pas de différence en ce qui concerne les moyennes journalières des niveaux de mélatonine entre les deux groupes (5).

Ceci laisse penser que la mélatonine ne serait significativement altérée par les CEM que chez les personnes qui y sont anormalement sensibles, ce qui pourrait contribuer au diagnostic de leur handicap physiologique.

Si l’on sait que la mélatonine agit au niveau de la barrière hémato-encéphalique (BHE) en inhibant les métalloprotéinases de matrice qui en commandent l’ouverture (6), moins de mélatonine veut dire une BHE plus ouverte et donc une exacerbation des troubles de l’électrohypersensibilité.

Concernant ceux-ci, l’effet le plus évident associé à un niveau de mélatonine diminué se manifeste par un déficit de sommeil, symptôme constaté de façon générale dans la population EHS.

En pratique, l’utilité d’une prise de mélatonine pour contrecarrer les effets des CEM sur l’insomnie est prouvée mais insuffisante vu sa courte durée d’action. Une action renforcée pourrait être obtenue par un traitement de fond avec le tryptophane, acide aminé alimentaire qui est le précurseur métabolique de la mélatonine par la voie de la sérotonine (7).

Autre conseil utile, porter des lunettes anti-ondes dans des conditions d’exposition intense ou régulière.

Références

(1) Glara Fuad Hasan, Specific absorption rate for frequency range used in GSM 900 and GSM 1800 MHz, CHERNE 2018-14th Workshop on European Collaboration in Higher Education on Radiological and Nuclear Engineering and Radiation Protection

(2) Sackf R. and Lewy A. Circadian rhythm sleep disorders: lessons from the blind. Sleep Medicine Reviews 2001; 5(3): 189-206

(3) Touitou Y. et al. Evaluation de l’effet des champs électromagnétiques (50Hz) sur la sécrétion de mélatonine chez l’homme et le rat. Bull Acad Natl Med 2002 ; 186(9) :1625-39

(4) Belpomme D. et al. Le Livre Noir des Ondes. Ed. Marco Pietteur(2021) page 322

(5) Crasson M. et al. Serum melatonin and urinary 6-sulfatoxymelatonin in major depression. Psychoneuroendocrinology 2004; 29(1): 1-12

(6) Alluri H. et al. Melatonin Preserves Blood-Brain Barrier Integrity and Permeability via Matrix Metalloproteinase-9 inhibition. PLoS one, 2016-journals.plos.org.

(7) L-Tryptophan Monograph. Alternative Medicine Review 2006; 11(1): 52-56

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