L’utilisation du téléphone portable affecte la qualité du sperme
par Judith Monfrini, tdg.ch, 16 janvier 2024
Une étude de l’Université de Genève, menée au niveau national sur de jeunes recrues, établit un lien entre fréquence d’utilisation et spermatozoïdes.
(Photo) : Du sperme humain observé au microscope (photo d’illustration).
GETTY IMAGES/SCIENCE PHOTO LIBRARY RF
Une étude menée au niveau national sur des hommes jeunes établit un lien entre fréquence d’utilisation et spermatozoïdes. Publiée en octobre 2023 par l’Université de Genève (UNIGE), cette étude a été menée auprès de 2886 recrues âgées entre 18 et 22 ans dans six centres de recrutement de l’armée.
Les participants ont livré un échantillon de sperme et rempli un questionnaire sur leur santé et leur mode de vie, y compris le nombre d’heures passées à utiliser leur téléphone portable ainsi que l’endroit où ils le plaçaient lorsqu’ils ne l’utilisaient pas.
L’analyse a porté sur les paramètres du sperme, le volume, la concentration en spermatozoïdes, leur nombre total ainsi que la motilité et la morphologie. Conclusion: une fréquence plus élevée d’utilisation du téléphone portable, soit plus de 20 fois par jour, était associée à une concentration de spermatozoïdes plus faible.
Faut-il s’inquiéter des résultats de cette étude? Nous avons posé la question à un gynécologue spécialiste de l’infertilité aux Hôpitaux universitaires de Genève, le docteur Federico Del Vento.
Docteur Del Vento, que vous inspire cette étude?
Je trouve le nombre de participants à l’étude intéressant – plus de 2800 – c’est un échantillon important. Mais elle reste néanmoins modeste, en regard de la thématique traitée. Il est difficile d’étendre ces résultats à toute la population. Il faudrait faire participer davantage de couples.
De surcroît, elle porte sur l’utilisation du téléphone entre 2005 et 2018 et la technologie a beaucoup évolué depuis. On constate effectivement une réduction de la concentration de spermatozoïdes mais on est encore loin du risque d’infertilité.
Les valeurs de référence de l’Organisation mondiale de la santé sont de 15 millions de spermatozoïdes par millilitre (ml) en moyenne. Ce chiffre correspond au minimum requis. L’étude observe une concentration de 44,5 millions de spermatozoïdes par ml chez les jeunes qui utilisent plus de 20 fois par jour leur téléphone contre 56,5 millions chez ceux qui l'utilisent moins.
On peut donc rassurer la population: il n’y a pas une augmentation avérée d’infertilité, même si l’analyse des données montre que le risque pourrait augmenter en cas d’utilisation très fréquente du téléphone portable.
Un couple sur six souffre d’infertilité en Suisse, ce qui signifie qu’après un an de rapports réguliers, il n’a toujours pas d’enfant. L’utilisation du portable n’augmente-t-il pas ce risque? Que remarquez-vous dans votre pratique?
L'augmentation de l’infertilité dans la population générale ne se vérifie pas au niveau clinique. La population mondiale augmente constamment et dans nos pays, les causes sont plutôt sociologiques.
Depuis les années 50, les femmes se sont heureusement émancipées et grâce à la contraception, elles décident de leur grossesse. Je pars de l’idée que l’autodétermination d’un couple est positive, qu’il puisse librement organiser sa vie reproductive. C’est bien d’informer les gens mais il faut savoir délivrer l’information correctement, ne pas la banaliser mais ne pas alarmer non plus la population.
Le téléphone portable et ses conséquences vous inquiètent moins que d’autres facteurs au niveau de l’infertilité?
La sédentarité, l’abus d’alcool ou l’obésité sont des causes avérées d’infertilité qui nous inquiètent bien davantage. Je constate qu’il devient difficile de dire aux gens: «Madame ou Monsieur, il faut arrêter de fumer, limiter votre consommation d’alcool, ne pas consommer de toxiques et pratiquer une activité physique modérée pour améliorer votre santé et votre fertilité.»
J’ai l’impression qu’il y a quelques années, les patients écoutaient les médecins. Actuellement, donner des conseils de vie saine, manger mieux, voir un diététicien, faire du sport, apparaît trop souvent comme un jugement. Tous ces facteurs agissent sur la quantité de spermatozoïdes et sur leur qualité.
Faut-il donner des conseils de prudence aux jeunes hommes, comme ne pas mettre le téléphone dans la poche?
Ce qui compte, semble-t-il selon l’étude, c’est le nombre d’utilisations par jour du téléphone, soit plus de vingt fois par jour. Mais il faut souligner que la technologie a changé depuis 2018 et que les téléphones portables délivrent moins d’énergie. En dehors du mode de vie, l’âge exerce également une influence sur l’infertilité. À 25, 35 ou 45 ans, elle n’est pas la même pour les femmes mais aussi pour les hommes, on constate une progression de certaines altérations du spermogramme.
https://www.tdg.ch/der-familles-lutilisation-du-telephone-portable-affecte-la-concentration-du-sperme-570072582596
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