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18 mars 2022

Suisse : Antennes à l’enquête à Échallens «On autorise la 5G comme on a autorisé la cigarette ou l’amiante»

Antennes à l’enquête à Échallens
«On autorise la 5G comme on a autorisé la cigarette ou l’amiante»
par Sylvain Muller, 24heures.ch, 18 mars 2022

Spécialiste de l’électrosmog, Olivier Bodenmann explique pourquoi il s’oppose à un projet d’envergure à Échallens en particulier et à cette nouvelle technologie en général.

Trois opérateurs et neuf antennes doubles de téléphonie mobile, capables d’atteindre une puissance maximale de 18’000 W. C’est le projet mis à l’enquête jusqu’au 27 mars prochain au sommet du centre collecteur de céréales d’Échallens. «C’est énorme et, pour moi, c’est une première dans un village!» commente Olivier Bodenmann, spécialiste des questions d’électrosmog.

(Photo): L’ingénieur électricien EPFL Olivier Bodenmann devant les antennes du centre collecteur d’Échallens. 
PATRICK MARTIN/24HEURES

Doublement concerné puisque également habitant du bourg, cet ingénieur EPFL en génie électrique explique pourquoi il a adhéré au collectif Stop 5G Échallens et, surtout, pourquoi ses constats scientifiques l’ont convaincu de s’opposer au développement de cette technologie.

Depuis quand vous intéressez-vous à ces questions d’électrosmog?

Depuis que ma compagne a commencé à se plaindre de certains ressentis, comme des brûlures ou des acouphènes. J’ai d’abord cru que c’était surtout psychosomatique, mais quand j’ai commencé à mesurer les radiofréquences dans notre appartement, j’ai pu faire des liens directs entre mes mesures et ses ressentis.

Quel problème pose, selon vous, l’introduction de la 5G?

On change de type de technologie sans en connaître les conséquences. C’est comme si on passait d’un éclairage de stade de foot, global, aux faisceaux des spots de défense antiaérienne. Le problème est qu’on va mettre en service cette nouvelle technologie sans qu’il existe d’appareil et de méthode de mesure capables d’évaluer sur la durée les effets des émissions.

Mais il existe des limites fixées par la Confédération, non?

Oui, mais elles se basent sur des calculs théoriques et fixent des moyennes. Or, ces antennes vont avoir des pics d’émission très importants. C’est comme si on vous autorisait à faire des pointes à 300 km/h sur l’autoroute, tant que la moyenne de votre trajet ne dépasse pas 120 km/h. En plus, je me demande bien comment vont faire les opérateurs pour anticiper l’utilisation des antennes et ce qui se passera lorsque le système de limitation automatique de puissance devra tout d’un coup réduire drastiquement l’émission pour ne pas dépasser la moyenne autorisée.

Et ce sont ces pics qui vous inquiètent?

Oui, parce qu’on n’a aujourd’hui aucune idée précise de leurs effets sur le vivant, malgré le fait que l’existence de ces effets soit prouvée par des études. Tout ce qu’on peut imaginer est que du moment que ces pics seront plus importants, leurs effets le seront aussi. On considère qu’aujourd’hui environ 10% de la population a développé une intolérance aux ondes électromagnétiques. Si la puissance augmente, la part de personnes qui se mettra à ressentir des effets devrait logiquement augmenter aussi.

La technologie de la 5G devrait toutefois permettre le développement de nouveaux appareils, utiles dans le domaine de la sécurité ou du médical.

Je ne nie pas qu’elle pourra avoir certaines applications très utiles. Mais a-t-on besoin d’exposer l’ensemble de la population à plus de rayonnement en faisant tout passer par le réseau mobile alors qu’il existe d’autres technologies efficaces? La fibre optique, qui est installée sur une grande partie du territoire, a une consommation électrique dix fois inférieure.

Pourquoi alors le développement du réseau 5G bénéficie-t-il d’un soutien politique?

Parce que les élus ne prennent en compte que l’intérêt économique et ne se posent pas la question de l’impact sur l’environnement. L’électricité fait partie du vivant: elle permet par exemple à nos neurones de communiquer entre eux. En autorisant le déploiement de la 5G, on prend un risque, comme on l’a pris en autorisant la cigarette ou l’utilisation de l’amiante…

Les promoteurs affirment pourtant qu’elle sera bénéfique pour l’environnement!

Je ne vois pas comment.  J’ai calculé que les antennes prévues à Échallens auront une consommation électrique de 157’000 kWh par an, ce qui représente 20’000 kilos de CO₂.  Et il faut ajouter l’effet de rebond, constitué par tout le matériel qui va être acheté et utilisé «grâce» à cette nouvelle technologie, ainsi que par tout le dispositif de stockage de données nécessaire en arrière-plan. Tout va dans le sens d’une augmentation de la consommation alors que la Confédération a fixé des objectifs de diminution drastique des émissions de CO₂ à l’horizon 2050.

Mais les opérateurs disent que si on ne fait rien, les réseaux actuels seront rapidement saturés!

Alors il faut se poser certaines questions, et on en vient au problème de la gratuité. On m’a raconté que des couples d’adolescents laissent leurs appels vidéo tourner toute la nuit pour s’écouter respirer en dormant. C’est très mignon, mais ça les irradie copieusement et ce n’est possible que parce qu’il y a des abonnements illimités. Et puis à quoi ça sert d’envoyer des vidéos en haute définition pour les diffuser sur des écrans de quelques centimètres carrés? Si on doit trouver de la place sur les réseaux, on peut déjà commencer par ces deux points-là!


Correction de texte OB 19mar2022
– consommation électrique de 157’000 kWh par an, ce qui représente 20’000 kilos de CO₂.–

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